Un coup de froid inattendu pour près de 14 millions de retraités du privé : la revalorisation des retraites complémentaires Agirc-Arrco est au point mort. Sous fond de comptes florissants et de divergences irréconciliables, retour sur une décision… qui n’en fut pas une.
Un rendez-vous annuel décisif… qui tourne court
Comme chaque mois d’octobre, le conseil d’administration de l’Agirc-Arrco avait pour mission de trancher sur l’incontournable question de la revalorisation des pensions complémentaires des salariés du privé. Habituellement, la revalorisation suit un mode opératoire bien huilé :
- Une augmentation calée sur l’inflation
- Un correctif « prudentiel » de 0,4 point pour garder la tête froide face à l’avenir
S’y ajoute une marge de manœuvre : le conseil peut ajuster le correctif à sa sauce, du moment qu’il respecte la fameuse règle d’or. Celle-ci impose, tel un écureuil très organisé, d’avoir sous le coude à 15 ans des réserves équivalentes à 6 mois de prestations. Question de prévoyance – on ne sait jamais, un hiver nucléaire des retraites est si vite arrivé !
Des finances solides, mais une cacophonie à la manœuvre
Sur le papier, le régime se porte comme un charme. Les chiffres avancés lors du conseil sont on ne peut plus rassurants :
- Résultat positif prévu pour 2024 : 4,6 milliards d’euros.
- Réserves actuelles : 86,5 milliards, soit l’équivalent de 10 mois et demi de prestations. Bien plus que la barre minimum des 6 mois !
Autant dire qu’en matière de bas de laine, l’Agirc-Arrco aurait de quoi tenir même une épidémie soudaine de danseuses étoile (on ne sait jamais… dans l’univers des prévisions, tout est possible).
Les projections financières n’y sont pas allées de main morte, annonçant qu’une revalorisation de 0,6% était non seulement possible mais aussi confortable. À ce niveau, équilibre garanti sur 15 ans et réserves en croissance. Pas de panique budgétaire à l’horizon.
Un blocage… aux conséquences immédiates
Mais voilà, tous les acteurs n’étaient pas d’accord pour faire tourner la roue. Du côté de la CFDT, compte tenu d’un contexte politique sous tension et d’une incertitude économique persistante, l’appel à la prudence était de mise. Mais qui dit prudence ne dit pas immobilisme ! Pour elle, descendre en-dessous de 0,6% de revalorisation, et surtout s’arrêter à 0,2% – chiffre proposé par le patronat – relevait de l’injustifiable.
Or, lors du fameux conseil du 17 octobre, le patronat, manifestement abonné au dogme de la sous-indexation, n’a pas fait dans la mesure. Sa position rigide a fait capoter toute possibilité d’accord. Résultat immédiat : aucun ajustement des pensions ne verra le jour cette année pour les retraités Agirc-Arrco.
Les impacts ?
- Les pensions complémentaires sont gelées.
- Près de 14 millions de retraités concernés.
- Une mesure jugée incompréhensible par certains administrateurs, la responsabilité incombant pleinement au patronat.
Une démonstration d’impuissance aux yeux de tous
Comble de l’ironie, cette défaillance survient alors même que la question de confier davantage de responsabilités aux partenaires sociaux dans la gestion des retraites agite le débat public. Entre deux conclaves, le patronat, loin de se distinguer, démontre selon ses détracteurs qu’il n’est pas à la hauteur de l’enjeu. Pour la seconde fois en 2025, le rideau tombe sur un triste spectacle de blocage institutionnel.
Conclusion : gel des pensions, frustration généralisée, et interrogations sur la capacité des partenaires sociaux à s’entendre au moment où la confiance dans la gestion collective se doit d’être exemplaire. Un conseil pour nos retraités ? Accordez une faveur à votre chocolat chaud automnal : il ne risque, lui, aucune marge de manœuvre. On ne peut pas en dire autant de votre pension…
