Demander un salaire pour un vrai travail : Tom, bénévole autiste, voit sa routine brisée et nous force à interroger ce que veut vraiment dire “inclusion en entreprise”.
Le parcours exemplaire d’un engagement méconnu
Depuis 2021, Tom Boyd, 27 ans et autiste, s’acquitte d’une mission aussi régulière qu’essentielle chez Waitrose, à Cheadle Hulme. Plus de 600 heures de mise en rayon, de gestion des stocks, toujours avec sérieux, ont fait de Tom un équipier salué pour sa constance. Derrière une communication parfois limitée, son implication est soutenue par des collègues attentifs et dévoués. Ses horaires s’allongent de façon progressive : de 9 h 30 à 14 h, deux jours par semaine, accompagné d’une assistance sociale, pour garantir son bien-être et la stabilité d’une précieuse routine. L’espoir familial ? Qu’à terme, cette expérience se traduise par une embauche rémunérée, concrétisant un parcours méritoire.
La demande légitime… et la rupture incompréhensible
Après cette montée en puissance, Tom, ou ses proches, se décide enfin à demander ce qui semble naturel : une rémunération. La réaction tombe comme un couperet : la mission cesse net. Pas de CDI à l’horizon, pas même une transition douce – la porte se ferme sans ménagement. Les compliments du personnel et l’expérience acquise ne suffisent plus : le chemin vers l’emploi, que tout le monde espérait, s’évapore brusquement. Un vrai choc. Pour Tom, c’est bien plus qu’une simple déception : sa routine, bâtie patiemment, se brise d’un instant à l’autre, menaçant l’équilibre familial.
- Plus de 600 heures de bénévolat accumulées
- Augmentation progressive des horaires
- Assistance sociale impliquée et équipe solidaire
- Espoir d’une évolution vers un contrat rémunéré
L’inclusion au travail à l’épreuve des faits
C’est sa mère, Frances Boyd, qui prend la parole et exige une reconnaissance concrète de cette implication. Pas de la poudre aux yeux ou de simples éloges, mais bien un salaire qui corresponde à l’investissement. Elle souligne l’augmentation progressive de la charge de travail, encadrée et assumée par Tom, et réclame une solution honnête. La direction, elle, oppose un refus, arguant que le poste de Tom ne regroupe pas toutes les tâches exigées pour être salarié. Frances Boyd pointe l’incohérence de cette justification : des employés sont bel et bien rémunérés sans remplir tous les critères imaginés. Elle rappelle surtout l’Equality Act 2010, qui impose aux employeurs d’adapter les postes et proscrit tout traitement défavorable à cause d’un handicap – difficile, dès lors, de justifier le statut figé de Tom.
Au-delà de la bataille légale, la question d’éthique prend le dessus : faire durer un bénévolat avec des horaires fixes et progressifs, est-ce bien conforme ? La gestion managériale peine à s’expliquer, l’absence de critères transparents nourrit l’incompréhension. Pour ne pas bouleverser les repères de Tom, la famille parle d’un magasin en “nettoyage”, pour éviter une coupure trop brutale. Mais à la maison, l’inquiétude règne :
- Statut de bénévole prolongé malgré la régularité de l’engagement
- Absence de perspectives concrètes
- Nécessité d’aménagements raisonnables, comme l’impose la loi
Inclusion, promesses et réalité : quelle voie pour demain ?
De son côté, l’enseigne se montre plutôt évasive. Elle rappelle en bloc son engagement pour l’inclusion, mentionne des partenariats divers, des stages ou encore des “aménagements raisonnables”. Interrogé par The Times, un porte-parole déplore la situation mais refuse de commenter le cas de Tom, se contentant d’annoncer une enquête. Pour Frances Boyd, pas question d’attaquer en justice : elle cherche une solution pragmatique. L’idéal ? Que Tom puisse réintégrer l’équipe, même à temps partiel, avec le soutien nécessaire. Un poste adapté, une échelle de progression mesurable, et surtout une visibilité sur l’avenir. La famille préfère l’action constructive à la confrontation.
Ce qui ressort de cette histoire, c’est l’évidence qui fait mal : il est temps que l’engagement et la ténacité, même derrière une communication différente, ouvrent la porte à l’emploi réel, pas au bénévolat à vie. Le cadre, adapté et rémunéré, est la clef de la stabilité et du sentiment d’inclusion. Et l’enquête promise, ce n’est pas seulement une formalité : ce doit être l’opportunité d’établir des règles justes, lisibles, qui redonnent confiance à Tom et à tous ceux pour qui inclusion doit rimer avec équité.
En résumé, le cas de Tom interpelle toutes les entreprises qui veulent, un jour, conjuguer engagement sociétal au présent de l’emploi et du respect. S’adapter, ce n’est pas seulement “accepter”, c’est aussi acter par la reconnaissance concrète du travail fourni. Quelque chose nous dit que la stabilité de chacun, ça commence souvent par un contrat… et par un peu d’humanité, tout simplement.
