Donner un prénom à son enfant, c’est jouer une carte capitale pour toute une vie. Sauf qu’en France, ce jeu n’est pas sans règles ! Dès 2025, certains prénoms resteront à jamais au stade de rêve farfelu ou de clin d’œil loupé, car la « liste noire » – certes invisible – n’a jamais été aussi bien encadrée. On fait le point sur ce que vous ne pourrez plus jamais appeler votre enfant (et pourquoi ce n’est pas plus mal).
Pas de liste officielle (mais une vigilance de chaque instant)
En France, contrairement à certains pays à listes fermées comme l’Allemagne ou le Danemark, aucune liste de prénoms interdits n’existe. C’est à la fois une liberté et une responsabilité : chaque demande est examinée au cas par cas. Cette individualisation permet de s’adapter au contexte, mais aussi d’éviter la tentation d’inventer n’importe quoi pour le simple plaisir d’être original.
Derrière cette souplesse, il y a la loi du 8 janvier 1993 et l’article 57 du Code civil, qui donnent au parquet et au juge la mission de protéger l’enfant contre un choix manifestement préjudiciable. Prénoms commerciaux, insultants, absurdes ou sources de confusion : toute tentative de contourner le bon sens risque d’atterrir sur le bureau du juge aux affaires familiales, souvent alerté par les agents de l’état civil. Autant dire que baptiser son fils « Mini-Cooper » ou sa fille « Fraise », c’est risquer de se retrouver dans les annales… mais pas pour de bonnes raisons.
Le cas français : des garde-fous, mais pas de censure artificielle
La décision repose sur des critères concrets et – si besoin – explications à la clé. On écarte tout d’abord les prénoms porteurs de railleries prévisibles. Il ne s’agit pas de brider l’originalité, mais de veiller à ce que l’enfant puisse aborder la vie sans commencer par lutter contre son identité. Quelques exemples d’interdictions passées l’illustrent :
- « Nutella » (2015) : refusé pour sa référence commerciale trop directe et sa capacité à inspirer les blagues les plus douteuses dans la cour de récré. À la place, le tribunal a proposé un prénom usuel, histoire de sauver la mise au principal intéressé.
- « Mini-Cooper » : même sort, l’état civil n’étant pas un salon automobile !
- « Fraise » : trop fantaisiste pour garantir une identité stable et un avenir sans moqueries à la pelle.
- Le combo « Mégane Renault » : retoqué pour ne pas transformer l’intéressé en panneau publicitaire roulant.
- « Lucifer » : rejeté pour sa charge religieuse peu compatible avec la laïcité et l’intérêt supérieur de l’enfant.
- « Titeuf » ou « Clitorine » : l’un, héros de BD un peu trop ridicule, l’autre, anatomiquement… gênant. Les deux hors-jeu.
Vous l’aurez compris, le juge veille à la dignité de l’enfant et anticipe son parcours futur, des bancs de l’école à la vie active.
Des critères d’analyse posés (et un brin de sagesse collective)
Face à chaque cas, la justice française examine une palette de critères :
- Le risque d’intégration sociale (un prénom trop inattendu peut-il fermer des portes ?).
- Le danger de discrimination (faut-il s’appeler « Adolphe » en 2025 ? La société a choisi : certainement pas, et ce même sans interdiction officielle…).
- La sincérité de la démarche parentale : délire fugace ou vrai projet éducatif ?
- La compatibilité avec les valeurs de la République : la laïcité, l’absence d’incitation à la haine ou à la vulgarité, etc.
Les magistrats cherchent très souvent un compromis : proposer un second prénom plus classique, suggérer une légère modification d’orthographe, ou expliquer calmement pourquoi le choix ne passera pas le cap de l’état civil. Bref, l’objectif n’est pas d’uniformiser le paysage, mais de garantir à chaque enfant un prénom « portable » aussi bien sur Snapchat qu’au guichet de la CAF…
Originalité bienvenue, mais prudence obligatoire
Les prénoms d’origine étrangère sont généralement acceptés, tant que rien n’entrave l’intégration de l’enfant dans la société. La culture numérique, la mode des séries ou des jeux vidéo apportent leur lot de tentations dans le choix du prénom. Là encore, la justice veille à ce qu’un clin d’œil pop culture ne tourne pas au fardeau identitaire trente ans plus tard.
Pour résumer, la France n’affiche pas publiquement de « liste noire », mais il y a bel et bien des limites, dictées par l’intérêt supérieur de l’enfant. Si l’originalité a toute sa place, c’est la prudence et la mesure qui l’emportent quand il s’agit de donner une identité à vie. Le meilleur conseil ? Osez la singularité, tout en gardant à l’esprit qu’un prénom, c’est pour la vie… et pour toutes les circonstances !
