Aux États-Unis, les avancées en matière de droits LGBTQIA+, autrefois synonymes d’espoir et de reconnaissance, subissent aujourd’hui une régression inédite. Après des années d’efforts, la suppression des passeports transgenres et l’effacement de la mention X plongent la communauté dans l’incertitude et la colère. Retour sur cette bascule historique où la liberté de genre se heurte à une nouvelle ère de restrictions et d’exclusions.
Un retour en arrière : la disparition des passeports transgenres et de la mention X
Depuis janvier 2025, c’est un véritable séisme administratif pour les personnes transgenres et non-binaires aux États-Unis. Le gouvernement a imposé à toutes celles et ceux ayant obtenu des passeports modifiés à la suite d’une transition de recevoir de nouveaux documents… indiquant le genre attribué à la naissance. La possibilité de voir son identité respectée sur ses papiers officiels ? Rayée d’un trait, tout simplement. Adieu, la mention X qui, instaurée sous l’administration Biden, permettait enfin d’exister autrement que dans la case masculin ou féminin.
Cerise sur le gâteau (piquée d’amertume, celle-là) : désormais, les touristes transgenres ou non-binaires doivent eux aussi mentionner le genre de naissance sur leur visa. Pour quiconque souhaitait voyager aux États-Unis tout en respectant son identité, il faudra repasser.
Une onde de choc législative dans une société déjà fragmentée
Ce bouleversement n’arrive pas de nulle part : il s’inscrit dans une série de mesures adoptées depuis 2023 dans différents États américains. Interdictions d’accès aux toilettes pour femmes et aux compétitions sportives féminines pour les femmes transgenres, lois bannissant jusqu’aux mots « gay, lesbienne, bisexuel et transgenre » dans les écoles, la fameuse politique « Don’t say gay »… Les exemples recensés par Human Rights Campaign se multiplient, et la liste n’est pas près de s’épuiser.
En décembre 2024, Donald Trump déclarait vouloir « mettre fin aux mutilations sexuelles des enfants, exclure les transgenres de l’armée et les exclure des écoles primaires, des collèges et des lycées ». Parole tenue : en 2025, il signe un décret mettant fin aux aides publiques pour les transitions de genre chez les mineurs, et interdit le financement d’établissements proposant ces traitements. Voilà comment, en quelques signatures, le droit de vivre selon le genre qui correspond à chacun bascule dans l’arbitraire d’État.
Conséquences pour la communauté : une identité niée, des droits menacés
La nouvelle politique officielle est claire : « Dès aujourd’hui, il n’y a que deux genres : masculin et féminin. » Les personnes non-binaires, effacées des papiers, se retrouvent invisibles, illégitimes et, soulignons-le, confrontées à un véritable casse-tête administratif. Les démarches entamées pour obtenir des documents reflétant sa réalité ? Jetées aux oubliettes.
Du côté des entreprises, le bilan n’est guère plus réjouissant. Les guidelines de l’initiative fédérale « diversity, equity and inclusion » (DEI) sont annulées, les fonds drastiquement réduits. Résultat ? Nombreuses sont les sociétés à abandonner, à contrecœur ou pas, une démarche censée garantir respect et égalité. Le climat se durcit et la communauté LGBTQIA+ redoute la suite.
- Les protections contre la discrimination varient toujours d’un État à l’autre.
- Seuls 23 États et quelques territoires interdisent la discrimination fondée sur l’orientation sexuelle ; ils sont 22 à interdire celle fondée sur l’identité ou l’expression de genre.
- Certaines législations familiales et d’adoption demeurent restrictives selon l’État de résidence.
En mai 2025, l’exclusion frappe les militaires transgenres, incités à quitter l’armée pour éviter de perdre leurs avantages de vétérans. Le droit de posséder des armes pour les personnes transgenres ? En suspens, avec un projet d’interdiction gouvernementale. Quant aux droits des mineurs transgenres, la Cour suprême a confirmé en juin 2025 une loi du Tennessee interdisant les soins de réinsertion sociale, ouvrant la porte à d’autres restrictions dans tout le pays.
Une exception portoricaine et l’avenir d’une communauté sous tension
Là où les États-Unis resserrent la vis, Porto Rico, État associé, choisit d’ouvrir la porte : les personnes non-binaires et non conformes au genre peuvent désormais sélectionner la mention « X » sur leur certificat de naissance. Un petit rayon de lumière dans la tempête.
Face à la disparition de la mention X et la suppression des passeports transgenres, la communauté LGBTQIA+ se mobilise et s’inquiète : quel droit, demain, pourra encore être défendu ? La société américaine, déjà fracturée par de fortes oppositions politiques et régionales, voit ainsi l’universalité des droits individuels remise en question. En attendant un éventuel retour de bâton législatif, reste la détermination inaltérable de celles et ceux qui refusent de disparaître dans les marges d’un formulaire. Peut-être le début d’une (future) renaissance ?