Le simple renouvellement d’une ordonnance peut-il devenir un champ de mines déontologique ? À Bois-de-Céné, ce qui devait être un banal acte administratif relance un débat musclé sur la prescription, la sécurité des soins, et la fameuse liberté clinique du praticien. Décryptage d’une affaire qui secoue bien plus qu’un stéthoscope…
Quand une ordonnance refuse de se plier
Dans un cabinet médical sous tension, chaque consultation ressemble parfois à une partie de Mikado : le moindre geste, la moindre décision, risque de faire tout s’effondrer. Dans le cas qui nous occupe, tout démarre par une demande de renouvellement d’un traitement contre l’hypertension, initialement prescrit aux urgences. Apparemment simple, mais la généraliste vendéenne, elle, ne plie pas : pas d’examen, pas de stylo dégainé. Elle refuse le renouvellement d’un mois au patient, préférant privilégier un suivi encadré plutôt qu’une reconduction automatique d’un traitement initié ailleurs.
Pourquoi ? Parce que la sécurité prime : « prescrire à l’aveugle », surtout quand le contexte est flou, expose à l’erreur. Ici, le patient indique des douleurs thoraciques et de violents maux de tête. La praticienne, elle, ne décèle pas d’urgence immédiate mais maintient que toute ordonnance mérite vérification. En cause : le respect de la déontologie, la qualité du suivi et, ne l’oublions pas, la relation fragile entre soignant et soigné.
Feu aux poudres dans la salle d’attente
La scène ne se limite évidemment pas à un simple désaccord sur une prescription. L’accueil chez la secrétaire dérape, alimentant un climat électrique. Un autre patient tente d’apaiser la situation : cela se transforme en altercation. Petite anecdote qui en dit long, deux ans plus tôt, un remplaçant avait déjà dû gérer un comportement agressif, refus de masque sanitaire et scène filmée à l’appui. Bref, ambiance…
La généraliste, cependant, ne souhaite ni se dérober ni compromettre l’accès aux soins. Plutôt que de camper sur un « non » définitif, elle propose une solution :
- fournir une liste de confrères pouvant assurer la continuité
- proposer différentes options de rendez-vous
L’idée ? Offrir des alternatives concrètes pour que personne ne reste sur le carreau, même lorsque la confiance vacille ou que l’évaluation diverge.
Prescription : entre liberté et responsabilité
Toute l’affaire rebondit bien vite hors du cabinet, devant la chambre disciplinaire du conseil régional de l’Ordre des médecins des Pays-de-la-Loire. La praticienne ne s’y rend pas les mains vides : elle réclame 1 000 € pour plainte abusive, et 3 000 € de frais de justice. De son côté, le patient de 44 ans reste absent.
Les débats tournent autour de la liberté de prescription : le médecin doit-il systématiquement accéder à la demande du patient, au risque d’un suivi approximatif ? Selon la défense, pas de faute déontologique visible : refuser un renouvellement jugé inadapté, c’est justement respecter cette fameuse liberté médicale. La généraliste ne lâche pas l’affaire et invoque la sécurité des soins : renouveler sans examen, c’est ouvrir la porte à l’erreur, parfois lourde de conséquences.
Quid de la continuité ? Renvoyer le patient vers d’autres médecins, c’est garantir qu’il ne restera jamais sans solution, tout en protégeant les équipes du cabinet d’une tension parfois explosive.
Vers une clarification des principes ?
La décision finale, attendue dans les prochaines semaines, dira si la prudence l’emporte définitivement sur la rapidité. Cette procédure, au-delà du cas individuel, pose la question cruciale de l’équilibre :
- entre autonomie clinique du médecin et accès rapide au traitement
- entre rigueur, sécurité et adaptation au cas par cas
- entre confiance patient et responsabilité légale du soignant
La généraliste espère voir émerger une ligne claire : garantir la liberté de prescrire, encadrer les situations d’urgence alléguée, et défendre une relation de confiance sans jamais sacrifier le suivi sérieux imposé notamment par des pathologies comme l’hypertension.
Au final, un simple refus d’ordonnance aura rappelé que soigner, c’est d’abord analyser, vérifier, puis décider. Si l’Ordre des médecins donne raison à la prudence, le message sera limpide : sécurité d’abord, solutions toujours et prescription… jamais les yeux fermés!
