Vos messages chiffrés inviolables, c’est désormais possible : la cybersécurité entre dans l’ère quantique, et ce n’est plus de la science-fiction ! Lors du salon VivaTech, une démonstration fascinante sur le stand d’Orange a révélé comment de simples baies Toshiba, d’apparence banale, pourraient bouleverser la cybersécurité en France. Prêt à plonger dans un futur où même l’univers protège vos secrets ?
La faille insoupçonnée de nos échanges modernes
La plupart d’entre nous vivent sereinement, convaincus que leurs messages chiffrés sont à l’abri. Mais Thierry Gaillet, responsable innovation chez Orange, brise le rêve : « Le problème, c’est que des pirates stockent déjà aujourd’hui nos échanges chiffrés pour pouvoir les décrypter dans 10-15 ans ». Avec les algorithmes classiques comme RSA, rien n’est éternel : « On n’est jamais sûr que dans 5 ou 10 ans, un nouvel algorithme ne va pas tout casser. »
Aujourd’hui, la sécurité repose sur la difficulté de factoriser de très grands nombres. Les ordinateurs traditionnels en seraient incapables en plusieurs millénaires. Mais demain, un ordinateur quantique pourrait pulvériser ce délai en… quelques minutes. L’algorithme de Shor, par exemple, suffirait à briser RSA le jour où la puissance sera au rendez-vous.
Résultat ? Les pirates n’attendent pas qu’on trouve la clé, ils collectent déjà vos données chiffrées sur les fibres optiques, en utilisant la stratégie « Store Now, Decrypt Later ». Vos secrets d’aujourd’hui pourraient être dévoilés à n’importe qui avec un ordinateur quantique assez puissant dans dix ans.
La révolution Orange : physique 1, mathématiques 0
Face à cette menace, Orange fait bouger les lignes. Plutôt que d’espérer que les mathématiques tiennent bon, le pari est simple : utiliser les lois inviolables de la physique quantique. Thierry Gaillet explique en désignant les équipements Toshiba : « On manipule des particules de lumière une par une, des photons qu’on polarise ou dont on encode la phase… Si quelqu’un essaie d’espionner, il modifie automatiquement l’état quantique. »
Imaginez une enveloppe qui s’autodétruit si un curieux l’ouvre avant le destinataire : sauf qu’il ne s’agit plus de magie, mais de vraie physique. Aucune mesure, aucune interception n’est possible sans que les deux interlocuteurs en soient immédiatement avertis. « Là, on est tranquilles, ce n’est plus un algorithme, c’est la loi de la physique. »
Pour accompagner la transition, Orange va plus loin qu’une simple installation matérielle. Son équipe réalise un audit de sécurité : « On fait une sorte d’inventaire pour voir quels points sont critiques, ce qui doit être mis à jour en urgence. »
- Si un système est à risque, on recommande une mise à jour.
- Si c’est vraiment sensible, on conseille de passer au quantique.
Le processus clé ? La génération de clés quantiques avec des photons envoyés vers un séparateur 50/50 pour produire des bits parfaitement aléatoires. À la clé, une méthode de chiffrement inviolable, du moment qu’on applique la technique du masque jetable (une clé au moins aussi longue que le message à protéger).
Une cybersécurité hybride et déjà appliquée
Orange Quantum Defender ne mise pas tout sur une seule carte. La solution combine la distribution quantique de clés (QKD) et la cryptographie post-quantique (PQC) : la première protège les transmissions, la seconde gère les certificats et l’authentification. Ce « mélange » de clés garantit ainsi une défense à double étage.
Ce n’est pas de la recherche en laboratoire : un grand acteur financier en France utilise déjà ce service pour sécuriser ses sites critiques. L’installation se fait sur le réseau de fibre Orange habituel, comme on le ferait pour un routeur, rien de révolutionnaire pour les équipes techniques — sauf que la sécurité est, elle, longuement en avance.
Le partenariat avec des géants comme Microsoft, Google ou Amazon permet aussi de sécuriser les trajets de données vers le cloud, là où se logent les secrets les plus sensibles.
Défis, ambitions et géopolitique de la fibre quantique
Si les ordinateurs quantiques grand public ne sont pas encore une réalité (ouf !), l’anticipation est de mise. D-Wave s’attaque à l’optimisation, IBM et Google travaillent sur des qubits logiques nécessitant 1000 qubits physiques chacun, et des start-ups françaises telles que C12 innovent avec des approches de grande qualité.
Il reste des défis techniques : pas de répéteurs quantiques standards, une cohérence du photon très éphémère (nanosecondes à millisecondes avec mémoire quantique), et la nécessité de collaborations internationales. Dans le cadre des projets ParisRegionQCI et FranceQCI, la recherche avance : des liaisons de 80 kilomètres entre Saclay et Paris ont déjà été réalisées, parfois même entre la Bundesbank et la Banque de France.
Sur le terrain, Orange propose d’intégrer ces équipements quantiques en parallèle des solutions classiques (Cisco, Fortinet, Palo Alto, etc.). L’industriel mise sur ses infrastructures existantes pour réduire les coûts — car une liaison QKD sur moins de 100 km coûte encore dans les 180 à 250 000 euros.
La géopolitique n’est jamais loin : la souveraineté technologique conditionne le rythme des investissements. Les applications dépassent largement le chiffrement : détection de variations de gravité, guidage de missiles… Les usages stratégiques du quantique donnent aisément le vertige.
En conclusion, la cybersécurité quantique n’appartient plus au futur : elle est là, en phase d’industrialisation, prête à protéger les données sensibles des nouvelles menaces. Vouloir rester à la traîne ? On vous laisse le plaisir du frisson, mais l’univers, lui, veille déjà sur vos secrets !
